MINIMALISME 3, DU "BESOIN-BÉQUILLE "À LA DÉPENDANCE PARTIE 1

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Reprenons notre réflexion sur les questions liées à la compulsion qu'on se pose. Les précédents billets  sur ce thème sont ici et .

J'ai commencé à lire (mais pas terminé) un livre "de développement personnel", Victime des autres bourreau de soi-même.
Je vous laisse 2-3 minutes pour que vous puissiez pouffer en toute liberté, moquez-vous, j'aurais fait pareil à votre place, je suis en putain de roue libre, on est d'accord. Alors oui le titre est un cliché pathos ambulant ( doux euphémisme ) mais j' y ai trouvé des choses très intéressantes dans ce bouquin, notamment pour ce qui nous concerne ici, l'achat compulsif.

Alors le mec, Guy Corneau ne parle pas spécifiquement de l'achat compulsif mais de la dépendance au sens large et c'est de ça dont j'aimerais que l'on parle.

Il y a un moment quand t'es compulsif où justement, tu te rends compte que tu es compulsif, parce que ce n'est pas un truc qui te saute immédiatement aux yeux.
Oui parce que c'est pas à l'achat de ton quatrième jeans du mois que tu sens qu'il y a un problème, non, t'as le temps de voir ton armoire déborder avant de voir qu'il y a un léger souci avec ta consommation.

En ce qui me concerne, c'est surtout les autres qui l'ont senti avant moi, ce problème.
Mon mec de l'époque notamment... De mon côté, je voyais pas pourquoi j'avais un problème, j'étais pas héroïnomane, donc bon, acheter des conneries chez H&M c'était pas aussi grave qu'il semblait le penser.
Et puis pour lui (et me) prouver qu'il n'y avait pas de souci, je lui ai dit que j'arrêtais d'acheter pour 1 mois, comme ça il verrait que je n'avais pas de souci.
Je n'ai évidement pas tenu 2 jours mais encore une fois, était-ce un vrai souci que de me faire plaisir sans que ça ne fasse du mal à quiconque? Sincèrement je ne voyais pas où était le souci...

Et puis les éléments se sont cumulés, j'ai commencé à voir que je ne pouvais pas me passer de mes errances dans les rayons des magasins nancéiens, que j'en avais BESOIN. Les jours sans se révélaient être des jours encore plus vides... Merde, qu'est-ce qui se passait?
Bien sûr que les sapes n'avaient aucun lien direct avec mes ressentis et vides, mais j'avais le sentiment que seuls eux pouvaient pallier à ça...

La situation se détériorant, je suis allée voir quelqu'un pour essayer de mettre le doigt sur ce qui n'allait pas avec "moi". Et ça a été utile et instructif... Mais pas suffisant.

Et vous connaissez la suite, j'en ai déjà parlé plusieurs fois.
J'ai alterné les périodes plus ou moins "en contrôle", on en reparlera par la suite, mais mon réflexe, mon instinct presque, si la journée n'a pas été très agréable, c'est d'acheter quelque chose.

Maintenant que le shopping est quasiment devenu une activité, un loisir, il est plus difficile de sentir son propre souci avec les achats systématiques et conséquents. De plus en plus de gens achètent exagérément, comment y voir un "problème" alors que tout nous pousse à consommer encore et toujours. Alors qu'on se lasse toujours plus vite, qu'il y a les blogs, les vlogs ou les hauls?
C'est difficile parce que ce que je ressentais comme étant "mon exagération d'achat" est quasi devenu une norme, alors cibler le trop est de plus en plus difficile.

Ma limite se situe à cet endroit je crois: un superflu de plus en fréquent et une satisfaction de moins en moins importante. Je le sens mais ces choses sont sûrement très personnelles...

Introduction un poilou trop longue, mais c'est notre "réflexion" approfondie du mois... Au moins...

Aujourd'hui, je voulais qu'on s'intéresse justement à deux moments clés dans ce processus: le premier qui fait que l'on cherche une compensation dans l'achat et le second, celui qui nous fait passer de la compensation à l'habitude d'achat. Parce que la compulsion d'achat ça s'installe à force de, c'est aussi simple que ça.
On devient fumeur à force de fumer, on devient compulsif à force d'acheter.

Donc il y a d'un côté les premiers achats béquilles qui répondent à des "blessures" (profondes, narcissiques, anciennes, moins anciennes, c'est relatif à chacun). Et c'est ces blessures là qu'il faut cibler puisque l'achat excessif n'est qu'une compensation qui permet de soulager une "souffrance" (ça peut aller du complexe simple à des choses plus spécifiques). En gros, dixit Guy Corneau l'auteur du bouquin, "la compensation sert donc à suppléer un manque ressenti. ce manque créé une tension et cette tension appelle une réponse apte à la résoudre. Comme la personne ne sait pas exactement ce qui la tend ainsi, on ne peut pas répondre pour le moment au besoin réel, elle utilise des palliatifs. Ces derniers apportent une satisfaction de remplacement qui substitue à la satisfaction réelle. Cette satisfaction de remplacement en arrive parfois à faire oublier le besoin de départ. Peu à peu, ces compensations deviennent confortables et c'est d'elles que l'on va avoir besoin... Création de dépendance".

Donc: à l'intérieur de nous existe une tension (le manque de confiance en soi par exemple, mais on ne le sent pas vraiment de manière aussi simple). Cette tension nous rend mal, on va aller acheter un nouveau manteau sensé nous faire plaisir, nous rendre plus jolie donc, on imagine, plus confiant. Ca marche, on se sent mieux. Ca dure évidement le temps que ça dure, et comme on souvient de la légèreté ressentie lors de l'achat du dit manteau, on reproduit. Et encore. Et encore. Et on a pris l'habitude, les achats ne nous font plus autant de bien qu'avant mais on arrive plus à s'en empêcher...

Guy Corneau encore "Ca marche très bien, ces gratifications (les achats) sembleront prendre le pouvoir de nous combler. Redoublement d'ardeur dans leur consommation en espérant que l'intensité de leur effet nous procurera une satisfaction plus profonde. (Apparition de la dépendance). En somme, la répétition fréquente du même comportement fait en sorte que le système de compensation se rigidifie avec le temps. Il se produit alors un assujettissement (i.e. état de dépendance)".

Bon je vais conclure avant de passer, dans la partie 2 (dans un prochain post parce que là, je suis en roue libre en ce qui concerne la longueur de ce post) à l'analyse pratique de mon cas à moi, pour se faire une idée des raisons profondes.

"On est loin de lutter pour satisfaire le besoin réel ou pour comprendre les blessures qui le sous-tendent. On est en train de passer à l'acte sans réfléchir pour se débarrasser d'une tension intérieure. Même en mobilisant toutes ses forces contre la substance en question, pour arrêter de fumer par exemple, on risque d'aboutir à un échec si on n'accepte pas de prendre conscience des mobiles de fond".

Bon, j'enfonce sûrement un paquet de portes déjà ouvertes, mais c'est toujours intéressant de refaire un point là-dessus.

Donc si vous êtes comme moi, il peut être assez pertinent de réfléchir posément, sans jugement, à vos "tensions internes".




Commentaires

aemi a dit…
Coucou Marie.. je vois que le sujet te "re"-travaille... Je sais de quoi tu parles car je suis une ex-accumulatrice (pas que de vêtements). Cela fait presque 3 ans que j'ai commencé mon blog et que je travaille à tout réduire, je suis assez contente du chemin parcouru mais ceci dit, je suis comme toi, je me pose toujours plein de questions car je suis passée d'une frustration (ne plus aller dans les magasins dès que j'avais du temps libre) à d'autres exagérations (acheter sur internet) puis d'autres frustrations (arrêter d'acheter sur internet..) puis en achetant moins mais plus cher (et donc, toujours un problème pour mon compte en banque), j'ai tenté de me plonger dans mon blog de façon parfois boulimique (exagération) puis passer mon temps sur le net à la recherche d'interaction (frustration de vérifier ses réseaux sociaux toutes les 5 minutes...) . Bref j'ai l'impression que je ne fais que déplacer un problème d'un monde à un autre. Je me demande parfois si on n'est pas tout simplement perpétuellement à la recherche d'un sens à notre vie...
Marie a dit…

aemi: Oui il y a probablement une question autour du sens, mais nous pouvons être rassurée, ça n'est pas une question isolée, on est beaucoup dans ce cas ;-)
C'est juste qu'on cherche les réponses dans des endroits étranges
Merci pour ton commentaire
Anonyme a dit…
Bonjour Marie,

je commente très très rarement ici, et pourtant j'adore te lire. Nous avons le même age, nous sommes fan de Buffy... Bref, des points communs !
Ces posts autour de l'achat compulsif me parlent. Il y a 4 ans, j'ai commencé une dépression profonde qui m'a fait perdre 10 kilos. D'une taille 40, je suis passée à un 34/36. Moi qui n'avais jamais eu confiance en moi et qui me suis toujours (même à cette période) trouvée énorme, j'ai trouvé jouissif de rentrer dans ces tailles-là et j'ai acheté... Quelques milliers d'euros sont partis en fumée... Je ne pouvais plus m'arrêter.
Et puis en allant mieux, j'ai repris du poids. Du coup j'ai du me rhabiller à nouveau... Nouveaux achats...
J'ai réussi à stopper ce processus aujourd'hui car j'ai eu un bébé il y a un an et mes priorités ont changé. Sans doute ai-je pu redonner du sens à ma vie.
Je suis beaucoup plus réfléchie quant à ma façon d'envisager mes achats de fringues. Mais parfois, les anciens démons resurgissent et je peux dépenser 300€ dans une seule boutique...
Difficile de s'affranchir de tout ça. Je sais ce qui ne va pas avec moi, je sais pourquoi j'ai besoin de combler un manque. Mais une fois que le malaise est identifié, ça ne résout malheureusement pas tout... Vraiment pas, en tout cas pour moi.
Merci Marie !
Céline
audrey sasha a dit…
merci pour toutes ces réflexions qui font vraiment réfléchir, je ne me considère pas une acheteuse compulsive mais ça fait quand même réfléchir à nos habitudes de consommation ....
bisous marie!!!
Je me reconnais tellement bien dans le mécanisme, chez moi c'est les bouquins ou les magazines, j'achète le premier et ça me fait vraiment du bien, et puis plus j'en achète moins le réconfort est grand. Plus j'en ai moins j'ai envie de commencer à les lire, parce que je ne sais plus lequel, choisir, ça me frustre, je me remets à acheter espèrant que ce sera mieux avec le prochain. Chez moi ce qui m'aide c'est de prendre du recul, me poser quelques minutes, et de prendre soin de moi (dormir manger, faire su sport). Grâce aux exercices de méditation de l'application Headspace, j'y arrive de mieux en mieux.

A bientôt

Emeline
Clue a dit…
Chère Marie
peut-être as-tu du mal avec le vide et le présent?
Je suis loin d'être un exemple, j'ai plein de trucs que je fais pour échapper à ce qui me turlupine, mais j'ai entendu récemment qqn qui délivrait un enseignement de méditation et qui disait "pour ceux qui ne connaissent pas, je résumerai le principe de la méditation comme celui de ne plus lutter contre soi, ne pas chercher à faire mieux que ce qu'on est à l'instant présent". Etre triste, bon eh bien ok je suis triste aujourd'hui, je vais pas essayer de changer ça, ça changera tout seul mais j'accepte, bref ce genre de truc.
J'ai eu comme un éclair de comprhénesion qui m'est tombé dessus. On n'est pas obligé d'être en lutte. On peut aussi vivre le truc quand il est là, sans chercher à le virer.
ça me rappelle un truc qu'une (très très) chère amie m'avait dit quand j'étais en pleine rupture et que je dégustais tellement que j'avais fait des épisodes de malaise qualifiés par ma psy comme des essais de ma part pour échapper au réel. ça m'avait bouleversée de subir ça. Mon amie m'avait alors dit "et si tu essayais juste d'accueillir cette tristesse au lieu de la combattre de toutes tes forces? De la laisser simplement te traverser et ensuite partir? ce sera peut-être moins douloureux que de vouloir y échapper?"... ça m'avait sidérée, et finalement ce jour-là j'avais pas essayé de lutter et ça m'avait fait un bien dingue.

Bref, tout ça pour dire que juste, tous ces essais de transformer la vie en achetant/mangeant/ se voulant mieux et meilleure, c'est une agression contre soi qu'on pourrait peut-etre s'épargner en acceptant les émotions pour mieux les laisser partir ensuite.

Je ne suis sans doute pas très claire, mais disons que notre mortalité est un vrai sujet d'angoisse très naturel, et que je pense qu'on vit avec ça, tous, et que si on tombe dans des travers tels que ce que tu décris, c'est notre façon de tenter, d'une manière certes dérisoire, d'oublier notre mortalité. Mais comme dirait ma psy "en même temps, ça vous ferait pas super flipper de vous imaginer que c'est sans fin"?

Bref, ma remarque et ma reco : la méditation c'est un vrai truc pour tout ça,et les enseignements que j'ai écouté (dont celui d'une femme qui aujourd'hui, en plus de son boulot, va voir des prisonniers à Fresnes, on est donc loin des Bisounours) m'ont ouvert les yeux sur plein de choses.

Bises
Clue
Gaëlle a dit…
Salut Marie,
c'est toujours dur d'arriver après toi, parce que tu prends le temps de poser les choses, et du coup, j'ai toujours l'impression de lâcher un p'tit com merdique. Tant pis.
Comme toi, le sujet me travaille. J'ai une personnalité addictive et compulsive, et j'ai mis un bout de temps avant de m'en rendre compte et de l'accepter (j'ai été aidée par mon mari). C'est au cours d'un sevrage, et en consultation, que j'ai pu décortiquer avec le psy les mécanismes d'une dépendance. Ils sont toujours les mêmes, le ressort physique en plus pour certaines substances, mais je me suis toujours dis que le "crave" était le même quelque soit le besoin (médocs, fringues...café?)
Aujourd'hui je me considère toujours comme marchant au bord du précipice. Élever mes enfants, travailler beaucoup et vivre au jour le jour me permettent de ne pas me mettre en danger. Et oui, j'ai pris beaucoup de distances vis à vis des blogs, je considère certains comme de véritables pousse-au-crime (je sais pas s'il y a un s quelque part).
Bises.
Anonyme a dit…
Bonjour Marie,
Comme à ton habitude, tu es très juste dans ton analyse. J'ai besoin de creuser à propos de ses blessures narcissiques qu'il faut réparer. Je m'étais détachée de ces questions d'achats intempestifs ; et voilà que je plonge à nouveau, pour me consoler... Ton article tombe à pic ! J'attends le second avec impatience. J'ai du mal à pousser plus loin la réflexion, mon commentaire n'apporte que peu. J'interviens simplement pour te remercier de nous faire part de ton expérience qui apporte toujours beaucoup
Ysabelle a dit…
Je n'ai jamais été une acheteuse excessive, mais j'aime bien réfléchir à nos comportements et aux mécanismes qui les régissent
On sent que la question te travaille, j'espère que tu avances dans ta quête de sens/explications/solutions !
Tibo a dit…
Je lis ton article et je flippe en me reconnaissant dans mes pulsions d'achats :-(
Midi a dit…
Moi ça me parle aussi complètement. Je suis en plein dans ce que tu décris, et pourtant j'ai fait beaucoup de travail sur moi même, je ne devrais plus avoir besoin de ces gratifications illusoires. Le truc, c'est quoi faire une fois qu'on a compris ça ? Par quoi remplacer ces pulsions qui ne réconfortent que sur l'instant ? Par un truc qui apporte une satisfaction plus profonde et plus durable... Mais quoi, bordel ?
Peggy L a dit…
Tu mets pile le doigt la ou ca fais mal..... le manque de confiance... c'est mon cas... une evidence, depuis l'adolescence je voue un amour sans limite aux vetements, Ado c'est vrai que si tu portais les fringues cool... et bien tu faisais partie de la tribue "cool"...
ca m'est un peu restée persuadée que si j'etais bien habillée que si j'avais du style les gens m'aimeraient plus...un besoin de reconnaissance.. je ne sais pas..
je n'ai que tres peu confiance en moi, les vetements c'est un peu mon armure pour affronter le monde.. et des armures ils m'en faut plein de differentes...
ca marche tres bien, car tout le monde semble penser que je suis cette fille pleine d'assurance... comment sortir de ca .... j'ai des periodes ou je vais pouvoir me maitriser completement... puis ca va etre suivi de 2 mois de craquages etc... etc...
j'ai hate de lire la suite de tes recherches !!!!
Anonyme a dit…
Bonjour,
Incroyable! En lisant ce post j'ai eu envie de dire à plusieurs reprises "mais moi aussi!" Exactement ce qui est décrit : des pulsions irrépressibles (ou presque) en fin de journée me poussant dans les grands magasins (ouverts tard) pour acheter la piece indispensable à racheter la journée.
Le prix des pièces augmentant sensiblement au fur à mesure .. (mon revenu non hélas).
Aujourd'hui suite à un arret maladie (pas grave) et une période de pause je ne suis plus rentrée dans un magasin depuis des mois (pas sure d'arriver à me retenir sinon)
La pulsion revient certains jours (je ressens l'envie d'acheter un vêtement - n'importe lequel bien sur mais il faut qu'il soit cher et valorisant) mais plus rien à voir!
Par contre petit report sur la nourriture . Moins grave pour mon compte en banque mais plus genant pour ma silhouette:-(
Donc chercher ce qui ne va pas.. compliqué ça!!
Merci pour ce post!
Laure

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